Obscidience
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Et dans un soupçon de vent et de délice ..la feuille morte s'échoua
 
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 Hecate (début...)

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Hecate
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Hecate


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MessageSujet: Hecate (début...)   Hecate (début...) Iconminipostedch0Ven 8 Sep - 21:00

Note 1 : Hecate est armée, même si ce n'est pas à priori évident : évitez d'en avoir la preuve... (cette présentation donne toutefois un indice)



Note 2 : Plaie. Hecate a un passé chargé. En raison des règles de Dette de sang, elle est soumise à une Plaie en plus de tout ce qui peut se balader dans l'entrecité. Elle est constemment suivie par des Bhok'arala (singulier = bhok'aral). Ces petites créatures proches du singe sont, selon certains douées de raison, pourtant personne n'a jamais réussi à savoir si leurs cris constituaient un langage ou quelque chose de plus primitif. Ceux qui logent à la Camorra, et qui défient toutes les tentatives de s'en débarrasser, ont décidé de considérer Hecate comme une divinité. Ils la vénèrent, la suivent, font des offrandes... Ceci a le don d'énerver Hecate au plus haut point. (N'importe qui le serait en retrouvant sa robe favorite transformée en garde manger...)

Elle a donc pris l'habitude de constituer une réserve de cailloux à lancer sur les petites créatures à chaque occasion. Les bhok'arala, eux, vénèrent ces pierres comme des artefacts de grande valeur. Hecate s'est rendue compte il y a peu que sa provision de projectiles était mystérieusement entretenue et les cailloux remplacés chaque nuit...



Note 3 : Familiers. Hecate possède deux familiers ayant la forme de canidés fantômatiques.



Note 4 : Une section complète des installations de la Camorra est réservée à la meute de Hecate. Elle élève depuis des siècles une race toute particulière de... chien. Si on peut dire... Les animaux ont pour ainsi dire la taille de poneys et des mâchoires assorties. Ils sont très affectueux avec leur maîtresse mais malheureusement assez possessifs... malheureusement pour les autres humains, bien sûr. Ces dernières décénies, elle n'a que très rarement laissé ses chiots chasser à l'extérieur (tant mieux pour les citoyens...) mais qui sait....





Ceci est une traduction élaborée d’un enregistrement sur Cristal-esprit retrouvé dans l’entrepôt de la Camorra. Sa provenance, sujette à caution, est attribuée aux registres-pensées de la Dame. L’identité du narrateur n’a pu être déterminée avec précision. Les hypothèses les plus souvent retenues suggèrent qu’il s’agit d’un fragment sentient de l’Etrange ou d’un esprit défunt ayant voyagé.



Je péchais Dans la lagune du Jhag Odhan, le village avait été gravement endommagé pendant la dernière Longue Nuit et les Seigneurs se livraient à une nouvelle guerre. Pourtant nous devions manger et les fumerolles qui montaient des limbes sur lesquelles je voguais côté nuit serviraient bien mon peuple. J’imaginais déjà les jeunes reprenant des forces en les absorbant…

Pourtant jamais je n’aurais pu imaginer ce qui allait m’arriver en lieu et place d’une vie calme au service de miens comme l’augure le demandait.

J’ai soudain ressenti une impression désagréable, horrible même pour un aptorien comme moi. Cette sensation de s’évaporer, de ne plus rien être, de s’étioler, comme le décrivaient les textes des anciens sur les Guerres Noires. Et brusquement le monde changea. Je ne comprenais plus rien, je n’étais plus rien, les couleurs, les dimensions, mes sens, plus rien n’avait de signification. Je croyais devenir fou. Et tout s’arrêta.

Le monde avait repris un semblant de normalité : je flottais à nouveau, mais il n’y avait rien du tout autour de moi. Je ne m’expliquais pas ce qui avait bien pu se passer. J’explorai vaguement mon environnement immédiat avec un succès très modéré : l’endroit se qualifiait même à peine comme un lieu, et pourtant j’avais pu adapter mes perceptions à ce nouveau type d’environnement où dominaient les ondes électromagnétiques et les vibrations).

Et une voix m’appela. En utilisant mon Vrai Nom. Le choc me brisa presque : je savais ce que cela signifiait. J’ai pourtant essayé de ne pas montrer ma réaction, peut être l’intrus ne connaissait-il pas le pouvoir qu’il venait d’obtenir sur moi…

Je me retournai, faisant de nécessité vertu et mon regard se posa sur une créature étrange et, à mes yeux, complètement étrangère.

Sa texture était incroyable. Elle paraissait plus présente que n’importe quelle autre créature que j’ai jamais eu l’occasion de voir. Au lieu d’être changeante et nébuleuse, elle était nette et immuable. J’en oubliai presque ma situation.

Puis, comme ça comprenait visiblement ma façon de m’exprimer, je hasardai une question pour essayer de reprendre l’avantage. Je demandai son nom.

La chose émit un son et fut prise de tremblements. Puis elle me répondit qu’elle jouait ce petit jeu depuis plus longtemps que moi et qu’elle était navrée mais qu’elle ne pouvait pas me permettre de connaître son Vrai Nom. En revanche je pouvais utiliser son Nom de Don, Arethe, ou son Nom de Vie : Hecate. Ces mots étaient porteurs de sentiments qui m’étaient inconnus. J’avais du mal à comprendre à quoi ils correspondaient.

Visiblement, elle était consciente du pouvoir qu’elle avait sur moi mais n’était pas pressée de me commander, aussi la discussion se poursuivit quelque temps. J’en appris plus sur cette chose. Elle était ancienne, mais ça j’aurais pu le dire rien qu’à son aura. 32 siècles m’a-t-elle dit. Je n’avais aucune idée de la signification de ces notions mais elle m’assura que cela représentait bien plus que tout ce que je pouvais connaître. J’enrageais de découvrir si peu sur une chose qui en savait tant sur moi.

Je fus étonné de me rendre compte que cette créature si présente était une sorte de parasite qui sautait de « corps » en « corps » pour prolonger son existence. Je crois que c’est ce corps seulement qui donnait l’impression de netteté. Pourquoi se donner tant de mal pour un tel résultat ? Mystère et boule de gomme.

Elle a longtemps parlé d’elle, de ce qu’elle était : une « passeuse » comme ses semblables l’appelaient. Pourtant elle disait préférer d’autres termes comme « Phénix » ou « Théurge », parce que passeuse faisait trop « maison de passe ». Encore une fois je n’ai rien compris, sûrement ces mots comportaient une référence culturelle quelconque. Je me suis impatienté. Je lui ai donc demandé à quoi rimait tout ceci.

La réponse m’a glacé. Je ne devais pas trop me presser ; comme je n’apprécierais pas le dénouement de cette affaire, je ferais mieux de savourer chaque moment qui me restait. J’ai tout d’abord eu du mal à comprendre puis j’ai saisi. J’ai aussi été étonné de ne pas capter le genre de rage, de cruauté ou de combativité qui caractérisait les Seigneurs de mon monde, juste une sincérité un peu brutale mais motivée par une franchise vaguement bienveillante.

Je crois que je me suis résigné à ce moment là, c’était annoncé avec tellement de naturel et de finalité qu’on ne pouvait douter de ce qui m’était réservé. Je l’ai laissée me parler. Elle ne semblait pas pouvoir se lasser. J’en ai profité pour l’observer discrètement.

La créature, Hecate, était étrange. J’ai déjà mentionné le fait qu’elle était solide (c’est le mot qu’elle utiliserait pour désigner ce phénomène, je crois) au lieu d’être vaporeuse comme tout ce que je connaissais. Son corps, donc, était composé de longs appendices fuselés, d’un torse assez menu et d’une tête couronnée de nombreux longs filaments qui donnaient presque l’impression d’être aussi vaporeux que moi. Ils étaient longs comme la moitié de ma geôlière, avaient une teinte pâle et voletaient de ci de là comme s’ils n’étaient pas aussi solides que la créature. L’ovale du « visage » rassemblait les récepteurs sensoriels, je crois mais ils n’étaient pas faits pour enregistrer les mêmes phénomènes que moi. Ce qui me frappait le plus, c’était ce qu’elle appelait les yeux (des organes qui captent des ondes particulières) ils avaient une teinte tout à fait incongrue qui tranchait complètement avec le reste de ce que je pouvais observer : ils étaient d’un bleu très profond. Ils donnaient à la créature une expression ouverte et curieuse. D’autres filaments noirs délicats encadraient ses yeux en deux rangées : les plus proches étaient si longs qu’ils touchaient presque ses joues lorsqu’elle fermait les paupières, les autres, placés plus haut, sur l’arcade qui protégeait l’œil, étaient très courts et dessinaient une ligne discrète et élégante. Hecate m’expliqua, lorsqu’elle surprit mon attention, que les marques et la couleur de son visage, hormis pour les yeux, n’était pas naturelles, qu’elle utilisait un artifice pour obtenir un effet esthétique qu’elle appréciait et camoufler sa véritable apparence. Son épiderme était blanc mais demeurait parsemé de traits et de points noirs organisés en structures complexes. Ses lèvres tranchaient avec cet ensemble pâle par leur rouge vif. Un nez droit et délicat surmontait cette bouche tandis qu’un menton volontaire et bien dessiné terminait l’ovale. De part et d’autre du visage, juste sous les yeux, une fine ossature induisait des pommettes hautes et harmonieuses, achevant de’ composer un visage patricien. A mesure qu’elle parlait, ses fréquents sourires provoquaient l’apparition d’une fossette du côté droit, là où sa joue se contractait le plus souvent. Ces mêmes sourires provoquaient aussi l’apparition de deux rangées parfaites de dents d’une blancheur immaculée. Elle se disait très belle. Et je n’avais pas de mal à comprendre qu’il ne s’agissait en rien d’une vantardise banale : en dépit de son étrangeté, je me pris à partager son avis, d’abord en raison de la seule harmonie qui se dégageait de ce visage, puis petit à petit, en m’apercevant que j’éprouvais une sorte de familiarité vis-à-vis de la forme de cette créature. Je me la décrivais à moi-même en utilisant les mots justes alors que je n’avais auparavant pas connaissance que de telles choses aient pu exister. J’éprouvais un sentiment… d’appartenance. Pourtant c’était impossible : je n’avais rien de commun avec elles… Je n’ai pas trouvé de réponse satisfaisante et je me suis donc replongé dans mes observations, maintenant plus secoué que jamais. Je notai ses longs membres fuselés, la courbure des muscles qui glissaient sous l’épiderme, souples et fermes, sa démarche fluide et dynamique alors qu’elle se déplaçait devant moi en gesticulant, discourant de divers sujets auxquels je n’accordais pas la moindre importance. Au fil des paroles j’ai tout de même saisi qu’elle avait beau s’approprier des enveloppes sur lesquelles elle n’avait aucun droit, cela ne l’empêchait pas de manifester une sorte de reconnaissance en prenant soin du corps et en l’entretenant pour lui permettre de durer autant de temps que possible. Je demandai si le propriétaire initial en tirait un quelconque bénéfice, curieux, et fus ignoré en beauté.

Instinctivement je savais qu’elle entourait son corps de matériaux étrangers, pourtant aucun nom ne me venait. Elle m’éclaira en me disant que c’était des habits. Je l’avais lancée sur un sujet qui lui tenait à cœur, visiblement. Mais même avec mes intuitions étranges, je n’ai pas compris la moitié des termes utilisés et j’en suis sorti plutôt frustré qu’informé. Apparemment, elle possédait deux styles distincts qu’elle utilisait en alternance ou selon l’impulsion du moment. J’avais devant moi l’une de ces tenues, sorte de grande pièce de tissu immaculée enroulée de façon mystérieuse de sorte que le tout tienne en place. L’effet était saisissant pour une telle simplicité. Elle a du me dire que c’était une sorte de toge ou un chiton, je ne sais plus trop : c’était un souvenir de sa très lointaine jeunesse. L’autre style était plus sombre, il s’agissait essentiellement d’étoffes noires ou d’un violet très foncé, velours, soieries et d’un manteau de même teinte bordé de fourrures. Elle accompagnait généralement cet accoutrement d’un couvre chef sombre et d’un parapluie. Chose étrange, je n’ai même pas été choqué quand elle m’a expliqué ce qu’étaient les fourrures. Encore ce je-ne-sais-quoi familier… Quoi qu’il en soit, ces vêtements ne parvenaient pas à masquer les formes de son corps et ses courbes harmonieuses. Elle en semblait particulièrement fière et je me surpris à abonder en son sens instinctivement sans trop savoir pourquoi.

Je crois avoir bien cerné la personnalité de mon interlocutrice (si un tel mot peut être employé pour qualifier l’oratrice qui me débitait un quasi-monologue seulement brisé par moment par quelques unes de mes questions stupides). Une chose qu’elle a dite à propos d’autre chose, en particulier, la qualifierait bien, à mon avis.

La vérité avant le mensonge,

Le mensonge avant le poison,

Le poison avant la lame.

[
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MessageSujet: Re: Hecate (début...)   Hecate (début...) Iconminipostedch0Ven 8 Sep - 21:00

Cette créature savait ce qu’elle voulait et elle savait comment l’obtenir, je n’avais aucun doute là-dessus. Elle avait l’air de quelqu’un qui fait le nécessaire pour s’assurer des résultats quoiqu’il lui en coûte : elle prend ce qu’elle désire et en paie le prix. Brutale ? Sans aucun doute lorsque la nécessité lui apparaît. Cruelle ? Je ne pense pas. Pas consciemment en tout cas. La longueur de sa vie et les enjeux qui vont de paire avec ce genre d’existence ont tendance à mon avis à faire oublier certaines préoccupations plus terre-à-terre à un point où ce qui passe pour de la cruauté n’est que la franchise désintéressée de quelqu’un qui annonce l’inéluctable sans avoir songé à ce que cela peut signifier pour ceux qui sont concernés directement. C’est d’autant plus étrange qu’Hecate est de bonne compagnie. J’en oubliai presque de me soucier de mon destin en observant le jeu des expressions sur son visage et son animation alors qu’elle discourait. Ses explications en particulier restaient toujours précises et claires, allant droit au but. Dans une autre situation, j’aurais été honoré d’assister à une telle prouesse. Au début de la discussion, j’avais du mal à comprendre comment elle fonctionnait : d’un côté elle m’annonçait un destin funeste de sa main (j’en étais presque sûr), de l’autre, elle s’inquiétait de savoir si je n’étais pas perdu par les notions qu’elle utilisait ou si elle ne m’ennuyait pas trop. J’ai pensé à des moqueries. Pourtant elle était parfaitement sincère. Elle n’éprouvait même pas le besoin de mentir. J’imagine qu’elle ne ment que lorsqu’un mensonge est la seule manière d’arriver facilement à ses fins là où la vérité ne servirait à rien et où des solutions plus radicales seraient trop coûteuses… Malgré cette tendance à ne pas compromettre ses buts par un sentimentalisme déplacé ou par une trop grande compassion, elle restait, à mon avis (et il m’en coûte de l’admettre) quelqu’un de généralement bienveillant. Je le soupçonne, elle aurait très bien pu me réduire en esclavage sans autre procès, mais elle avait l’air de vouloir que je comprenne, et peut-être que j’accepte même. Un peu comme si elle regrettait ce qu’elle allait faire mais que ces regrets n’allaient certainement pas l’obliger à changer d’avis sur la tâche à accomplir. Je me suis demandé si elle éprouvait la même chose à propos des corps qu’elle prenait. Mais peut-être que dans ce cas là, c’était différent. En effet, je me suis vite rendu compte que si il y avait une chose qui la caractérisait, c’était sa confiance en elle et son ego. Elle était la première créature que je voyais qui était si complètement convaincue qu’elle constituait le pinacle de ce qui a été, est et sera jamais tout univers confondus. Je ne sais si c’était une façade mais elle paraissait réellement sûre de sa supériorité. Pas même l’attitude altière des Seigneurs de mon Monde ne pouvaient se comparer à elle. Hecate les faisait tout simplement passer pour des vantardises alors qu’elle, elle ne faisait qu’énoncer un fait lorsqu’elle annonçait sa perfection absolue. J’en restai stupéfait un moment. Tout autre personne m’aurait fait rire par une telle déclaration ; elle, seule, semblait convaincante. J’étais consterné de me rendre compte que j’y croyais réellement.

C’est quand, à la suite de cette révélation, j’exprimai ma stupéfaction qu’elle décida, pour appuyer ses propos, de me conter sa propre histoire… Je n’ai pas tout écouté, ou tout compris… En voici des morceaux choisis…



Elle était la fille d’un dignitaire romain, quoi que cela puisse vouloir dire. Un plénipotentiaire de l’Empire, plus exactement. L’époque n’était pas particulièrement propice à l’épanouissement des femmes et ses premières années ainsi que bon nombre des suivantes furent passées au sein du gynécée. A cette époque on ne demandait pas grand-chose d’une femme à part d’être belle et de se trouver un mari… Ou un lupanar pour y exercer ses talents.

L’ennui, c’est que Arethe (son nom à l’époque) n’était pas vraiment belle. Loin d’être laide, elle était simplement commune, comme invisible. Et son père lui en voulait pour ça : une atteinte à sa position et à son prestige. Il avait espéré en faire un nouveau joyau, il en était pour ses frais.

Pourtant la jeune fille était brillante. Elle avait un esprit acéré et elle était observatrice. Elle espionnait souvent les dîners donnés par son père dans le cadre de ses activités politiques, cachée derrière les lourds rideaux. Pour cela, elle risquait les foudres de son géniteur qui refusait de la voir ainsi défier son autorité.

La mère de la jeune fille n’était pas d’une grande utilité dans ces cas là… Elle était une belle femme soumise et obéissante qui jamais ne défiait son mari et qui passait ses journées à tisser des tapisseries raffinées. Rien de commun avec Arethe, dont l’esprit demandait sans cesse des nouveautés et des connaissances. Elle aurait très bien pu aider son père dans ses affaires, en particulier dans la gestion des domaines familiaux, qui ne demandait pas d’apparaître sur la scène publique. Pourtant l’homme s’entêtait. Il ne pouvait accepter que cette enfant sans grâce puisse avoir une utilité particulière, maintenant qu’elle avait échoué à combler ses espoirs réducteurs. Les brimades, sans être réellement cruelles, n’en restaient pas moins une constante douleur morale pour Arethe. Elle en vint par moment à détester le destin qui l’avait fait naître ainsi.

Alors qu’elle était encore jeune, son père fut mandaté auprès de l’Empire Romain d’Orient. Il allait partir pour Constantinople. La jeune femme n’eut pas le temps de se réjouir de la liberté qui allait être sienne quand il lui fut annoncé qu’elle accompagnerait le plénipotentiaire au cours de sa mission. Elle enrageait devant une telle injustice car la seule raison qui motivait cette demande était la volonté de son père de s’assurer un contrôle absolu sur sa vie à elle. Elle ne possédait de toutes façons pas les moyens de s’opposer à une telle décision et se plia à la volonté paternelle. En 460, à l’âge de 16 ans, elle quitta son domaine du Latium, sa villa à Rome et sa mère. Elle ne devait jamais les revoir.

Le voyage lui-même fut calme mais intéressant pour Arethe malgré les remontrances de son père. Les paysages la fascinaient et tout lui semblait nouveau. Son passage en Grèce et son arrivée dans la capitale Byzantine furent un des moments les plus intéressants et heureux de sa vie.

Elle déchanta vite une fois arrivée. Au milieu de ces contrées à l’histoire si riche, elle devait rester cloîtrée loin des yeux, loin du monde dans une semi-vie plus pénible que la mort. Elle lisait pour tromper son ennui. Et elle trouvait que l’Ombre d’Achille ne savait pas de quoi elle parlait lorsqu’elle affirmait qu’elle préfèrerait être esclave sur Terre que de demeurer Seigneur de son monde de morts et de spectres. Ce n’est que beaucoup plus tard qu’elle accorderait à certaines de ces lectures une importance capitale. Et rares étaient ceux qui se doutaient de la quantité de secrets qui dormaient là, attendant simplement qu’on daigne les utiliser….

Heureusement pour elle, les affaires d’Etat prenaient la majeure partie du temps de son père et contre toute attente, Arethe jouit d’une liberté accrue. Elle finit par se lier avec certaines personnes qui pouvaient lui faciliter l’accès aux connaissances dont elle était si friante. Elle fut tout d’abord frustrée par la faible quantité de vrai savoir et par l’immensité des superstitions inutiles. Pourtant, peu à peu, elle voyait un schéma apparaître. Oui, la majorité de ces histoires ne valait pas mieux que des contes à dormir debout. Mais derrières certains, résidait une puissance qui transcendait les siècles. C’est dans les mythes, et dans l’œuvre de certains des grands auteurs qu’on pouvait trouver des indices particulièrement intéressants. Peut-être étaient-ils au courant, peut-être ne faisaient-ils que rapporter ce dont ils avaient entendu parler… Dans tous les cas, ces écrits transpiraient le pouvoir. Arethe s’étonnait que personne n’ait remarqué cela avant. Ou du moins que cela ne soit pas de notoriété publique : cela paraissait si évident.

Les textes utiles parlaient tous, d’une façon ou d’une autre, de la façon de pénétrer dans le monde des morts, ou de l’amener vers les vivants. Il lui fallut près de 2 ans pour mettre bout à bout les morceaux de rituels, et les indices présents dans les principaux textes. Deux ans à esquiver les propositions pressantes de mariages arrangés. Deux ans à supporter les excès de plus en plus inconvenants de son patricien de père qui semblait imiter la décadence de son Empire. Pourtant, après tout ce temps, elle eut enfin réuni les pièces du puzzle et commença son premier rituel. Elle n’était pas complètement au point et faillit perdre la vie, emportée dans le « monde des morts » qu’elle essayait de contacter. A la place, la dépendance où elle se livrait à ses expériences fut complètement ravagée. Les serviteurs jurèrent toujours que les créatures de l’enfer avaient visité l’endroit, même menacés du fouet.

Par la suite, Arethe fut contactée par certaines de ses connaissances, averties dans le domaine de la magie. Auprès d’elles, elle apprit la prudence ainsi que les bases des techniques. Pourtant, même dans ce cadre ci, elle ne révéla jamais ce qu’elle avait appris par elle-même et la façon dont elle pensait pouvoir l’utiliser. La pratique qu’elle acquit à ce moment furent la base du pouvoir qu’elle développa plus tard. Déjà à cette époque, elle manifestait une capacité impressionnante à lever le voile… Peut être à cause de sa conception particulière des différents univers.

Arethe ne put malheureusement pas se consacrer à ses expériences comme elle le souhaitait. Son père se rendit compte du changement : elle était manifestement occupée à quelque chose de pas très sain. Il redoubla donc sa surveillance et décida finalement de lui trouver un honnête mari et surtout un allié politique. C’était la goutte qui faisait déborder le vase. C’est à ce moment qu’Arethe comprit que ses connaissances ne lui donnaient pas seulement un terrain de jeu abstrait, mais aussi le pouvoir de faire comme bon lui semblait et de ne pas se laisser dicter sa conduite.

Elle décida d’en finir. Comme l’Empire qu’il servait, le despote rencontrerait sa fin sous peu. Peu à peu, un plan germa dans son esprit. Elle couperait l’homme de ses soutiens jusqu’à ce que ses espoirs soient réduits à néant. Et il se détruirait seul. Sa première étape serait de trouver un allié. Et elle avait déjà en tête le fils du principal opposant (et partenaire) de son père. Une brute arrogante sans éducation… Un homme à qui il avait été question de la marier. Mais il servirait bien ses intérêts. Une seule chose la retenait encore. Une fois l’acte accompli, comment s’en sortir sans conséquences… Ce point l’obséda des journées entières. Dans tous les cas, elle risquait de devoir commettre elle-même un meurtre. Les personnages qu’elle envisageait de supprimer ne lui étaient pas particulièrement sympathiques et ce n’était pas l’acte en lui-même qui la retint. C’était plutôt qu’elle ne voyait pas de solution pour s’assurer une impunité après coup.

Puis une autre révélation se fit dans son esprit. Tout serait tellement plus pratique si elle pouvait simplement changer de vie. Sur le moment, ça paraissait trop farfelu. Mais après tout, si les âmes pouvaient voyager après la mort, pourquoi ne pas tenter de faire ça avant le décès ? Plus elle y pensait, plus cela lui semblait plausible… Mais le rituel nécessaire dépasserait en puissance tout ce qu’elle connaissait jusque là… Des mois passèrent alors qu’elle rassemblait des informations et qu’elle préparait le nécessaire pour le rituel.
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MessageSujet: Re: Hecate (début...)   Hecate (début...) Iconminipostedch0Ven 8 Sep - 21:01

Elle mit au point une procédure complexe qui, au terme de longues « négociations » avec le « monde des morts », comme elle se le représentait, permettait de maintenir ouvert un fin passage d’où elle tirerait la puissance pour assurer le transfert. Plusieurs problèmes demeuraient. Tout d’abord, le rituel, malgré les heures de méditation et de voyage mental nécessaires pour trouver l’unique chemin, le carrefour et le Portail, restait incomplet : pour voyager comme une Ombre sur les bords du Styx, une forme de mort était nécessaire. Arethe n’avait aucune preuve que tout avait fonctionner : au moment crucial, tout se jouerait sur un pari risqué. Ensuite, le rituel ne serait efficace qu’une vingtaine de jours au maximum. Enfin, prendre possession de quelqu’un ne se ferait pas sans risque : l’action demandait un hôte sous le joug d’une violente émotion dont l’objet était le théurge (c’est ainsi qu’elle se qualifiait) Dans le cas contraire, l’esprit pouvait se défendre et même gagner…

Pourtant, Arethe pensait avoir un plan infaillible.

Par le biais de ses relations, il fut aisé de se faire inviter à l’une des nombreuses fêtes données par sa cible. Trop heureux de compter parmi les convives la fille d’un de ses principaux rivaux, l’homme ne se fit pas prier et alla même jusqu’à lui faire la cour. Arethe n’en demandait pas tant. Elle n’eut pas à forcer ses talents de comédienne pour laisser entendre à cet être imbu de sa personne qu’elle succombait à son charme, qu’elle était prête à tout abandonner pour lui. Telle est la vanité des hommes et la jeune femme en joua avec une précision froide et un cynisme complet. Alors même qu’elle se donna finalement à lui, elle ne contemplait que l’accomplissement de la tâche qu’elle s’était fixée et supporta la douleur et la honte qu’elle ressentit. Elle avait décidé d’une course à suivre et pour obtenir ce qu’elle désirait, elle paierait le prix nécessaire sans se plaindre.

Révéler comme à contre cœur des informations confidentielles sur les affaires de son père se révéla être d’une facilité déconcertante. Quelques mots bien placés ici et là suffirent à aiguiller son pion vers la voie qu’elle souhaitait lui voir prendre. Il était tellement prévisible. Elle savait qu’il allait utiliser ses connaissances au plus vite pour mettre à genoux son père. Peu importait comment.

Les résultats ne se firent pas attendre : en quelques jours déjà les partenaires commerciaux et les alliés politiques se détournaient déjà. Le coup de grâce arriva lorsque, coup sur coup, deux des plus proches amis du père d’Arethe ainsi que sa maîtresse furent subitement victimes d’accidents mortels idiots. Le complot était proche de son apogée.

Laissant échapper sa soi-disant douleur et exposant d’hypothétiques remords, la jeune femme mit en marche la dernière phase de son plan. Comme il était inévitable lorsqu’on connaissait le caractère du Pion, sa colère et son envie de contempler la déchéance de son rival firent merveille. Il « obligea » Arethe à être témoin de la chute de son propre père. C’était pourtant exactement ce que recherchait la magicienne. Elle avait d’ailleurs déjà fait prévenir la garde du danger et imploré une intervention avant que l’irréparable ne soit commis… Avec juste ce qu’il fallait de retard, bien sûr...

Comme prévu, c’est lorsqu’il réalisa quel rôle avait eu sa fille dans ce cauchemar que le père d’Arethe fut finalement mis à genoux. La compréhension et la douleur emplirent son regard alors même que toute vie le fuyait. Il était mort avant de cesser de respirer et c’est machinalement qu’il se saisit de la dague que lui jeta négligemment sa fille en lui suggérant la seule issue possible.

Lui qui avait clamé son mépris et sa colère, promettant mille vengeances, quelques minutes plus tôt regardait à présent sans le voir un plafond où les plus grands artistes de l’Empire avaient représenté le retour d’Ulysse sur Ithaque pendant que son sang recouvrait peu à peu une mosaïque tout aussi raffinée. Alors, un sourire éclaira enfin les traits d’Arethe. Il lui restait à accomplir le dernier pas. Celui qui la libèrerait pour de bon. Alors même que la seule servante qu’elle n’avait pas renvoyé entrait dans la pièce et poussait un hurlement, elle se retourna doucement vers son complice involontaire, s’approcha à petits pas puis, une lueur glaciale dans les yeux, banda toute sa volonté avant d’arracher vivement l’épée courte du fourreau qui battait la cuisse de l’homme. Avant que ce dernier ait pu esquisser le moindre geste, elle retournait l’arme contre elle-même et l’enfonçait vigoureusement jusqu’à la garde dans sa propre poitrine.

La douleur fut bien pire que tout ce qu’elle avait pu imaginer pour se préparer. Elle luttait contre le froid qui engourdissait ses membres pour trouver la concentration nécessaire au Passage. Pourtant c’est lorsqu’elle ouvrir enfin le Portail et qu’elle sentit la magie à sa portée qu’elle prit peur pour la première fois : le Passage nécessitait la présence de sentiments forts. Or, ceux qu’éprouvait pour l’heure la servante ne s’apparentaient qu’à une égoïste peur pour son avenir personnel. Arethe avait misé sur l’attachement que la femme lui avait témoigné et s’était fourvoyée. La situation aurait paru risible sur le mode ironique même pour la principale intéressée si elle n’avait été aussi désespérée.

Elle se retourna mentalement vers son pion, mais celui-ci n’éprouvait que de la rage et son esprit était une forteresse qu’elle ne parvenait pas à enlever. Arethe commençait à paniquer. Jamais elle n’avait cru que cette étape puisse être si complexe : elle s’était toujours crue capable de surmonter l’épreuve facilement… Mais la réalité était toute autre et elle voyait maintenant sa fin approcher et Charon tendre sa main osseuse vers elle.

Soudain, une lueur d’espoir revint. Une présence qui approchait. Plusieurs hommes. Et la pièce fut aussitôt après envahie de gardes armés de pied en cape. Il fallut d’interminables secondes à la jeune femme mourante pour les sonder et son cœur se déchira : une seule personne pouvait convenir dans son état d’épuisement. Hector, un jeune officier de la garde qu’elle connaissait et qui s’était souvent montré très prévenant. Sa réaction à la vue de son corps ensanglanter ne lassait aucun doute. Il aboya l’ordre de mettre aux arrêts toutes les personnes présentes et se précipita vers Arethe, la prenant dans ses bras.

Ce furent ses derniers actes. La magicienne, au désespoir, agit par instinct uniquement et remonta le lien, libérant toute la puissance du rituel dans ses veines. La force accumulée s’étendit au garde. Le transfert s’effectua dans une débauche d’énergie magique cataclysmique. Le monde prosaïque du commun des mortels ne sourcilla pas, pas même un rêve humain ne fut troublé par ce qui venait de se produire.

Et Arethe ouvrit les yeux sur son propre corps qui la scrutait, une terreur sans nom dans le regard. Un vague mouvement des lèvres de son ancienne enveloppe attira ses nouveaux yeux : une question à peine formulée, « pourquoi ? ».

Et les premiers mots qu’elle prononça de sa nouvelle voix résonnèrent à la manière d’une prophétie… ou d’une épitaphe. « Je suis tellement désolée… Pardon…»

Mais elle ne tenait déjà plus qu’un corps sans vie dans ses bras et ces paroles restèrent orphelines _à jamais peut-être_ tandis qu’une unique larme tombait sur la joue qui avait été sienne avant de s’écouler, caressant une chair si familière qui refroidissait déjà…



Il n’y eut aucune sensation de victoire, aucune joie, lorsqu’elle quitta la demeure, emportant son propre corps avec elle. Morte-vivante, fossoyeur à son propre enterrement… Son témoignage dissipa les ironiquement les doutes et son Pion fut condamné et déchu de ses privilèges. Il commit un « suicide » forcé, évitant une honte supplémentaire à sa famille.

Arethe, elle, apprit à vivre autrement. Dans le corps d’un homme qui l’avait aimée. Ses efforts payèrent et elle réussit même à se convaincre par moments qu’elle avait bien fait.
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